La réalité virtuelle : le cinéma de demain ?

Une expérience intrigante : 
Lorsqu’on pénètre dans la salle sombre et inutilement grande où se déroule l’évènement, on ne sait pas trop à quoi s’attendre. Le personnel présent vous invite à vous asseoir, et l’on vous tend un masque noir de taille réduite, qui vient couvrir le pourtour de vos yeux et permettre qu’aucune lumière désagréable ne vienne troubler l’expérience. Ensuite, vous voyez s’approcher de vos yeux un ensemble de deux lentilles de verre reliées entre elles par une monture de plastique plus ou moins souple, puis le masque formé est placé sur vos yeux et alors se créée la magie. Succession de couleurs, de formes, de sons, le tout avec une totale liberté concernant le champ de vision : quelque soit la direction ou vous regardez, l’angle que vous donnez à votre vision, vous verrez toujours quelque chose. Il se créée donc une véritable alchimie, une immersion totale dans un monde de couleur et de sensations diverses. A ce tableau s’ajoute alors la projection de films plus ou moins en accord avec le thème : la séance dont il est question présentement présentait maints courts métrages aux tonalités et teneurs complètements différentes, parfois même opposées. Parmi ceux qui par bien des égards rentrent le plus dans le sujet, il y a ce court-métrage particulièrement graphique, une succession de traits de crayon en 3D au départ abstraits et disparates puis de plus en plus concrets au fur et à mesure que passe le temps, formant des silhouettes et finissant par raconter une histoire. Une histoire toute simple d’une personne qui sort de chez-elle et parcours sa ville, et dont le point de vue descend vers un métro, qui s’enfonce dans les entrailles de la terre et se transforme en train avant de s’arrêter au niveau de la mer. Alors on la traverse, lente, calme et placide puis une effroyable tempête ravage la cité du début, et enfin on voit, pour finir cette silhouette qui sommeille sur son lit.
Une indéniable beauté : 
Ainsi donc la réalité virtuelle apporte réellement quelque chose lorsque le film où elle est utilisée est quelque chose de très graphique et de particulièrement représentatif. C’est indéniablement beau, poétique, et ce, que ce soit un dessin animé, comme le film dont il est question plus en amont ou l’histoire d’un astronaute chutant de l’orbite terrestre après un rêve, mais également lorsque le métrage prend un aspect plus technologique, plus photographique. C’était notamment le cas d’un film allemand, produit par un organisme du Baden-Würtemberg qui traversait différents points de vue pour rendre compte de la beauté du monde, et notamment en passant à travers différents environnements et paysages naturels. On navigue, âme diluée entre chaque différente scène, et on peut contempler chaque aspect, chaque élément et chaque détail de ce qui nous entour, dans une avalanche de couleur et de beauté picturale, qui ne laisse pas indemne tant le tout est, par bien des égards, beau. Nous avons ici une véritable impression de succession de tableau qui semblait plus marquant que l’expérience sur l’immersion du tableau Bosch, La Tentation de saint Antoine.
Un processus qui trouve néanmoins ces limites : 
D’un point de vue plus personnel, l’un des courts-métrages notamment était tellement étrange que le message énoncé par celui-ci n’est parvenu à toucher les deux personnes qui rédigèrent cet article. Pour dénoncer le réchauffement climatique, il met en scène des monuments ayant visiblement coulés, et on observe que l’humanité a désormais disparue et que la terre est envahie par des mantes religieuses géantes, le tout est raconté par une voix off peu concernée et se présente comme un mauvais film de David Lynch.
Ainsi, celle que l’on appelle la « VR » (Virtual Reality, en anglais réalité virtuelle)  peut parfois révéler ses limites : certains films ne présentent aucun intérêt en « VR », comme par exemple ce documentaire sur la vie familiale et l’emprisonnement en Italie, qui était malgré tout excellent mais ne présentait que peu ou pas d’intérêt à visionner en réalité virtuelle. Certes, on pouvait tourner la tête et regarder la prison, et ainsi se rendre compte du niveau de misère des conditions de vie des prisonniers, mais puisqu’on le voit quelque soit l’angle, que la prison le transpire par tous les ports de son mur, par le moindre interstice et par les moindres fissures, où est l’intérêt ?
Maxence Girod-Fagard et Christiano Lefranc Lycée François Ier, Le Havre.

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